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Ecole française du début vers 1600 D'après Léonard de Vinci Portrait de Lisa Gherardini, dit La Joconde ou Mona Lisa Huile sur panneau de chêne, parqueté Portrait of Lisa Gherardini, also said La Joconde or Mona Lisa, after Leonardo, oil on oak panel, French School, ca. 1600 74 x 52 cm (29,13 x 20,47 in.) Commentaire : " Voici donc le plus célèbre tableau du monde, gloire mystérieuse qui ne tient pas seulement au génie. " : Nous sommes à Washington, le 9 janvier 1963, et André Malraux vient de présenter la 'Joconde' au président John F. Kennedy1. A l'aube de 2022, la Joconde ne quitte plus ses cimaises parisiennes depuis quelques décennies déjà et cette déclaration pourrait passer pour une lapalissade si l'attraction exercée par Mona Lisa n'était pas toujours d'une actualité brûlante, tant pour le public exprimant à grand renfort de 'selfies' sur les réseaux sociaux son enthousiasme à retrouver le chemin du Louvre après des mois de restrictions, que pour les artistes qui, siècle après siècle, s'inspirent de Léonard, dans une démarche tantôt respectueuse, tantôt iconoclaste, mais avec une fidélité sans faille ! Peintres, écrivains, photographes, publicitaires, grands couturiers, artistes de tous bords et de toutes périodes, " jocondoclastes " et " jocondophiles ", vont s'emparer au fil des siècles du visage de Mona Lisa, comme si proposer sa version de la 'Joconde' était depuis l'aube des Temps modernes une étape incontournable dans un parcours artistique. Quelques exemples, célèbres ou moins célèbres, méritent d'être cités : au début du XVIIe siècle, un portraitiste auteur d'élégants petits portraits féminins, régulièrement identifié comme Jean Ducayer, propose une 'Joconde au corsage brodé' aujourd'hui conservée au musée des Beaux-Arts de Tours (fig. 1). Dans un texte publié en 1882, la plume romantique de Théophile Gautier se laisse à son tour inspirer : '" La Joconde ! Sphinx de beauté qui souris si mystérieusement dans le cadre de Léonard de Vinci et sembles proposer à l'admiration des siècles une énigme qu'ils n'ont pas encore résolue, un attrait invincible ramène toujours vers toi ! Oh ! en effet, qui n'est resté accoudé de longues heures devant cette tête baignée de demi-teintes crépusculaires, enveloppée de crêpes transparents et dont les traits, mélodieusement noyés dans une vapeur violette, apparaissent comme une création du Rêve à travers la gaze noire du Sommeil ! De quelle planète est tombé, au milieu d'un paysage d'azur, cet être étrange avec son regard qui promet des voluptés inconnues et son expression divinement ironique ?² "'. Son contemporain Camille Corot, à son tour séduit par l'intemporelle beauté, délaisse le temps d'un portrait ses délicats paysages pour représenter dans l'attitude de Mona Lisa une Femme à la perle à laquelle le visiteur du Louvre pourra rendre visite bien plus sereinement qu'à son aïeule (fig. 2). Dès la fin du XIXe siècle, le discours devient plus railleur et Sapeck réalise en 1883 pour l'exposition des Arts incohérents une 'Mona Lisa fumant la pipe' (fig. 3) qui ouvre la voie au célèbre L.H.O.O.Q. de Marcel Duchamp de 1919, 'ready-made' partant d'une carte postale sur laquelle l'artiste dessine une petite moustache et un bouc ainsi que la légende à épeler à haute-voix. La notoriété et les détournements s'accélèrent au début du XXe siècle avec l'événement mémorable du vol de la 'Joconde' en août 1911 par l'ouvrier italien Vincenzo Perugia, saisi de compassion pour sa compatriote déracinée. Coupures de journaux, cartes postales, publicités, chars de carnaval (!), Mona Lisa est partout sauf à sa place qu'elle regagne finalement en 1913. Andy Warhol, Fernand Léger, Botero, Yves Saint Laurent, Basquiat (fig. 4), Albert Cohen3, Philippe Geluck…, la liste des références célèbres à la 'Joconde' serait longue encore. Citons pour finir l'un de ses plus récents détournements, la "Rubik Mona Lisa " d'Invader, réalisée en 2005 (fig. 5), qui précéda celle que nous proposons ici sur les cimaises de l'hôtel Dassault4. Cette version pixélisée du XXIe siècle, pour actuelle qu'elle soit, n'est d'ailleurs sans doute pas la plus " jocondoclaste " et fait preuve d'un certain assagissement après les contorsions que le XXe siècle fit faire à Mona Lisa. Mais revenons à présent au beau XVIe siècle, aux débuts de la grande histoire de la Joconde avec la France et à la version tout à fait " jocondophile " e

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